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La permaculture et le sol. Une approche ethnobiologique de l'agriculture et de la culture de la "permanence"

Gaëtan Morard

Depuis quelques années, le terme "permaculture" fait une discrète apparition en Suisse-romande."La Perma-quoi ?" La perma-culture, issue de la contraction d'agriculture et de permanence est un mouvement originaire d'Australie, né dans les années 70, qui cherche à créer des systèmes humains résilients et durables, à l'image des écosystèmes naturels. "Ah oui, une nouvelle technique de jardinage écologique ?".



Loin d'une simple technique de jardinage, elle se définit avant tout comme une méthode de design écologique et holistique pouvant s'appliquer aussi bien à des projets à petite échelle sur des balcons ou dans les jardins que, à plus grande échelle, sur plusieurs dizaines d'hectares. Gaëtan Morard, ethnobiologiste de l'Université de Neuchâtel, analyse l'apparition de ce nouveau paradigme et de cette nouvelle pratique en Suisse et en France sous un angle interdisciplinaire, mobilisant les méthodes propres à l'ethnologie (observation participante et entretiens) et celles issues des sciences de l'environnement (analyses des sols et de la végétation).

Satisfaire les besoins de l'homme tout en respectant l’environnement

Basé sur un constat d'échec de nos sociétés modernes à gérer de manière durable nos ressources, le mouvement de la permaculture se donne pour défi de satisfaire les besoins de l'homme tout en respectant notre environnement, grâce à l'imitation des schémas de la nature et l'optimisation de l'énergie solaire. A la fois science et philosophie, il s'articule autour de trois éthiques : prendre soin de la terre, prendre soin de l'humain et partager équitablement les ressources, accordant autant d'importance à la manière de faire qu'au résultat. Le respect de la vie du sol et de la biodiversité amène un refus de certaines pratiques agricoles comme le labour ou l'utilisation de produits de synthèse. Celles-ci sont remplacées par des techniques comme les couvertures de sol permanentes, les associations de plantes vivaces et l'étagement de végétation. Le compostage à l'aide de vers ou de toilettes sèches permet de transformer les déchets et pollutions en ressources pour le système. Les besoins en énergies non-durables fossiles sont diminués par une optimisation de l'énergie solaire, au moyen d'une planification et d'un agencement réfléchis des éléments du site.
 
Les sols sont les véritables pierres fondatrices des collectifs humains : l'humus est au cœur du mot "humanité". Véritables lieux interdimensionnels, les sols représentent la production alimentaire, le support à la vie humaine, animale et végétale, la propriété privée et sa transmission : ils sont des symboles d'un type de relation à l'environnement. Les permaculteurs cherchent ainsi à harmoniser cette relation en accordant une attention particulière à la partie agricole de nos sociétés. Lorsque le sol et les plantes sont considérés comme de véritables êtres vivants, s'instaure une relation sociale entre les éléments qui mène à adopter de nouvelles pratiques agricoles.
 
Filière en ethnobiologie de l'Université de Neuchâtel

Les enjeux écologiques et sociaux actuels, soulevés par la critique du modèle agricole industriel et, au-delà, par la remise en question de notre modèle de société basé sur la croissance, méritent une approche particulière. Afin de proposer des pistes de solutions aux défis environnementaux qui se posent actuellement, il paraît essentiel de transcender les barrières entre disciplines. Encore trop souvent segmentées, les sciences n'entrent pas toujours en dialogue et ne permettent pas d'avoir une vision globale d'un même sujet. Dans ce travail, les relations entre les permaculteurs et leurs environnements sont approchées de manière interdisciplinaire et multiscalaire. Celui-ci a pu voir le jour grâce à la jeune filière en ethnobiologie de l'Université de Neuchâtel qui tente de poser les bases d'une interdisciplinarité appliquée.

Infos

Gaëtan Morard. La permaculture et le sol. Une approche ethnobiologique de l'agriculture et de la culture de la "permanence". 2014. 151 p, collection Ethnoscope, numéro 14, publiée par l’Institut d’ethnologie de l’Université de Neuchâtel.
A commander par courriel patricia.demailly@unine.ch ou en appelant au 032 718 17 10