Communiqué

votations : comment "huiler" le système démocratique suisse ?

Neuchâtel, le 16 septembre 2009.  Les Suisses sont très fiers de leur démocratie. Ils pourraient néanmoins en faire bien meilleur usage. Dans son mémoire de licence à l'Université de Neuchâtel, Patricia Michaud met en exergue les efforts entrepris par la Confédération pour améliorer les connaissances civiques des citoyennes et citoyens, et par là même l'ensemble du système démocratique suisse.

En Suisse, le taux de participation aux votations avoisine généralement les 40%. Ce chiffre dénote à la fois un manque d'engagement et de compétences chez les confédérés suisses. Cette constatation a motivé un travail de licence à la Faculté des lettres et sciences humaines de l'Université de Neuchâtel. Selon son auteure, Patricia Michaud, le « bon fonctionnement de la démocratie tout entière, ainsi que sa légitimation » seraient ainsi entravés. La jeune diplômée relève que « la vision idyllique d'un pays offrant de larges possibilités de participation aux citoyennes ne trouve pas forcément sa correspondance dans la réalité. » L'abstentionnisme et les votes aléatoires feraient-ils voler en éclat notre bel idéal démocratique ?

Dans son mémoire, Patricia Michaud analyse l'attitude des autorités fédérales confrontées au déficit d'activisme et de connaissances politiques au sein de la population helvétique. « L'Etat ne demeure pas inactif face à une démocratie en mal d'entrain, note-t-elle. Pour voler à son secours, il a recours, notamment, à des pratiques de communication allant dans le sens d'une éducation civique des citoyens. » C'est principalement sur ces efforts mis en oeuvre par la Confédération pour former les Helvètes à la citoyenneté que se concentre l'étude en question. Un sujet jusque-là très peu creusé, cette étude étant la première à aborder la question.

Point particulièrement piquant relevé par l'auteure : la Confédération entreprend la formation à la citoyenneté des habitants du pays de façon presque inconsciente, sans coordination, sans plans d'action et sans critères d'évaluation. Parmi les outils mis en oeuvre figurent plusieurs brochures (La Confédération en bref, par exemple, ou les Explications du Conseil fédéral, distribuée lors de chaque votation depuis 1978), mais aussi des sites web (comme admin.ch ou ch.ch). Les efforts entrepris ne restent pas sans résultats. Ainsi, selon une étude citée par Patricia Michaud dans son mémoire, 51% des citoyens helvétiques s'informent en vue d'un scrutin par le biais de la brochure explicative éditée par la Confédération. Mais 51,5% préfèrent s'en remettre à la radio, 67,2% à la télévision et 73,7% à la partie éditoriale des journaux (ces statistiques tiennent compte des différents canaux que peut utiliser une seule et même personne).

Les médias jouent donc un rôle important dans la transmission de savoirs politiques et dans le processus de formation de l'opinion publique. Un rôle qui, selon la jeune diplômée, « ne cesse de croître en Suisse ». Le regard que jette Patricia Michaud sur la presse n'est cependant pas exempt de critique. « Or, si les médias helvétiques dispensent des informations plus objectives, équilibrées et indépendantes qu'à une époque antérieure qui voyait, entre autres, fleurir les journaux partisans, la diversité des opinions est réduite, souligne-t-elle [...] Les organes de presse doivent en effet lutter pour leur survie et ont recours à des techniques telles que la personnalisation, le sensationnalisme, la popularisation et la trivialisation de thèmes complexes. » Citant divers interlocuteurs à l'appui, elle déplore l'abandon par les médias de leurs priorités « politico-journalistiques » et le manque de profondeur dans le traitement des objets de votations.

Le travail de Patricia Michaud interpelle, car il remet en cause des valeurs fondamentales aux yeux des Suisses. Ne sommes-nous pas éminemment fiers de notre droit au référendum et à l'initiative ? Notre héritage politique n'est-il pas le dénominateur culturel commun à tous les groupes - linguistiques ou religieux - qui composent notre société ? Alors, pourquoi ce taux de participation de quelque 40% seulement à chaque votation ? Cette étude montre non seulement les actions en cours pour améliorer la situation, elle donne également plusieurs pistes.


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