Communiqué

La vidéosurveillance en Europe sous la loupe d’un chercheur de Neuchâtel

22 mars 2012

L’effet préventif tant vanté par les promoteurs de la vidéosurveillance ne se vérifie souvent pas à long terme. Toutefois l’utilité des caméras pour élucider des crimes est bien réelle. C’est l’une des conclusions de la revue internationale Information Polity qui consacre un numéro spécial à la thématique des caméras de surveillance. Coéditée par Francisco Klauser, professeur assistant en géographie politique à l’Université de Neuchâtel, cette édition spéciale publie une série d’articles sur les usages et les effets de la surveillance vidéo des lieux publics dans 12 pays européens. Une première du genre.

La Grande-Bretagne compte quelque cinq millions de caméras qui scrutent en permanence son territoire. Un record sur le plan européen, mais qui ne semble pas pour autant avoir fait reculer le nombre de délits, constate Francisco Klauser, à la lecture des différentes études publiées dans le numéro spécial d’Information Polity. « L’effet préventif est plus limité qu’on le pensait, indique l’expert de l’Université de Neuchâtel. Très rapidement, les gens repèrent la caméra. On ne fait souvent que déplacer le problème : si quelqu’un décide de voler une voiture, il va passer à l’acte à l’abri des objectifs, de nuit, dans une rue sombre.»

La première place de la Grande-Bretagne, eu égard aux moyens déployés, tient à l’organisation centralisée de la police et au fait que la sphère privée y est moins protégée que sur le continent. Cette surveillance a été mise en place il y a une quinzaine d’années déjà et a tout de même contribué à la résolution de bon nombre de crimes.

La France a aussi adopté relativement tôt - en 1995 - la surveillance des lieux publics, à travers une loi signée Charles Pasqua, le ministre de l’intérieur de l’époque. Cette loi consiste essentiellement à réglementer l’usage des caméras, en rendant obligatoire l’enregistrement de chaque unité auprès des instances gouvernementales. « On sait ainsi qui surveille quoi et où. Ce registre se révèle également très précieux pour les études académiques que nous menons », résume le chercheur. Dans l’Hexagone, l’installation de caméras est entrée dans les mœurs, le gouvernement français a même récemment décidé de ne plus parler de vidéosurveillance, mais de vidéoprotection... comme pour tenter de rassurer la population.

La Suède, comme la Suisse d’ailleurs, cible avant tout les transports publics, en déployant les caméras dans les trains, les bus et les trams. Le constat du point de vue de la prévention reste là aussi mitigé. Les gens oublient très vite la présence de l’objectif, comme en témoigne la scène de viol récemment rapportée dans un train suisse: l’action a été filmée en intégralité par la caméra du wagon.

Si, dans la plupart des pays européens, le déploiement des caméras est plutôt bien accepté, il existe toutefois des poches de résistance. A Hambourg, la surveillance électronique n’a carrément plus du tout la cote. « La résistance populaire était vive dans les débats politiques, et les autorités n’ont eu d’autre choix que de démonter les caméras déjà en place. C’est un cas assez unique », précise Francisco Klauser.

Pour le chercheur de l’Université de Neuchâtel, figurer parmi les quatre éditeurs de cette série d’articles couronne dix ans de recherches sur les usages et effets de la vidéosurveillance de différents lieux emblématiques : aéroports, gares, stades, et même secteur de la prostitution de la ville d’Olten.

Le communiqué au format pdf

Contact

Prof. Francisco Klauser

Institut de géographie
Tél. +41 32 718 16 79

francisco.klauser@unine.ch
 

En savoir plus

Information Polity, Number 4, 2011

Information Polity, Number 1, 2012